Le Monero qui tient son nom de la traduction du mot « pièce » en espéranto, est une crypto-monnaie créée dès l’origine dans le but d’assurer un haut niveau de confidentialité des transactions. Cette propriété essentielle est le reflet de l’idéal libertaire des créateurs qui ont voulu concevoir une monnaie axée sur la protection de la vie privée des utilisateurs, arguant que si la confidentialité des transactions est indispensable pour les institutions financières et les entreprises, elle l’est aussi pour les particuliers.
Le Monero est lancé en avril 2014 par un groupe de développeurs experts en cryptographie qui ont réussi à agréger autour d’eux une communauté de plusieurs dizaines de contributeurs, mais aussi de donateurs privés et sponsors, notamment des entreprises informatiques. Les créateurs ont pour la plupart choisi de rester anonymes, sauf le Sud-Africain Riccardo Spagni qui s’est imposé comme le porte-parole de la communauté Monero et s’exprime régulièrement sur Youtube et les réseaux sociaux.
Le Monero qui est issu d’un « fork » du Bytecoin, repose sur le protocole open-source CryptoNote et utilise un système original dit de « signatures en cercle » (ring signatures) et d’adresses furtives (stealth adresses) pour rendre les transactions intraçables. En effet, contrairement au réseau Bitcoin où les données de transaction (montants, adresses d’envoi et de réception) sont inscrites dans un registre public, une chaîne de blocs administrée via CryptoNote ne révèle pas l’origine ou la destination des unités de compte. Les signatures de cercle est un protocole cryptographique dont le but est de cacher la clef publique associée à la clef privée (spend key) ayant servi à signer une transaction, tout en étant en mesure de prouver l’authenticité de la signature. Dans le cas du Monero, le protocole s’appuie sur les travaux d’Eiichiro Fujisaki et de Koutarou Suzuki. Concrètement, une signature de cercle permet de signer un message au nom d’un ensemble de clefs publiques sans qu’il soit possible d’identifier l’auteur de la signature parmi les signataires (il y a équiprobabilité des émetteurs de la transaction parmi les signataires). Les nœuds du réseau peuvent juste s’assurer que la signature est correcte. A l’émission d’une transaction, la taille du cercle de signataires peut être augmentée selon le niveau de confidentialité souhaité et bien entendu contre des frais supplémentaires. Le système des adresses furtives permet à l’émetteur d’une transaction de créer des adresses à usage unique, aléatoires, pour le compte du récepteur. La clef privée de ces adresses est également liée au compte du récepteur, mais il est impossible pour une tierce partie d’identifier son adresse publique associée sans connaître sa clef d’observation (view key). Par ce procédé cryptographique, seules les contreparties impliquées peuvent avoir connaissance de la transaction. Par ailleurs, contrairement au Bitcoin, la chaîne de bloc Monero est protégée contre les fraudes du type « double-dépense » (double spending), qui consistent pour un utilisateur malveillant à tenter de dépenser deux fois le même coin ; en effet, chaque adresse furtive laisse une empreinte dans la chaîne de bloc et le protocole rejette toute transaction impliquant une adresse furtive qui a déjà été utilisée.
Dans la plupart des crypto-monnaies, la traçabilité des transactions inscrites dans la chaîne de bloc pose des problèmes de fongibilité. Certains coins peuvent être jugés “sales” lorsqu’ils sont passés par certains dark markets ou lorsque l’historique des transactions associées comporte des opérations illégales (coins volés par exemple). Grâce à la confidentialité des transactions, le Monero est fongible, chaque pièce ayant la même valeur indépendamment de son historique, ou de l’entité qui la possède. Ce caractère fongible du Monero lui confère un intérêt indéniable pour des entreprises ou des banques qui veulent utiliser ce nouveau type de monnaie sans divulguer des données sensibles, mais il en fait aussi une monnaie privilégiée pour les activités illégales…
Le Monero recourt à la méthode de preuve-de-travail (proof of work) pour créer les blocs additionnels dans la chaîne. Les blocs sont minés toutes les 120 seconde environ ce qui assure des transactions rapides. Les transactions sont beaucoup plus rapides que pour le Zcash, une autre crypto-monnaie axée sur la confidentialité utilisant les preuves à divulgation nulle de connaissance, plus lentes à générer. Contrairement au Bitcoin, qui est fabriqué par des machines conçues spécialement pour cette tâche, le Monero est produit sur des ordinateurs grand public (à processeur ordinaire) selon l’algorithme de preuve de travail plus « égalitaire » CryptoNight. Des « pools » de mineurs se sont constitués pour combiner leur puissance de calcul et être plus efficaces. En théorie, n’importe qui peut miner du Monero ou s’inscrire en ligne pour rejoindre un pool de minage de Monero. La rentabilité de cette activité diminuera inexorablement, l’algorithme ayant été programmé pour créer 18,132 millions de pièces d’ici à la fin de mai 2022 à un rythme décroissant progressivement, puis une émission résiduelle infinie de 0,6 XMR par bloc de 2 minutes (soit une inflation perpétuelle de moins de 1%), afin de conserver une incitation de minage.
A ce jour, créer un portefeuille sécurisé sur son ordinateur nécessite de savoir coder. Il est toutefois possible d’ouvrir un compte en ligne sur un site comme www.mymonero.com, mais l’anonymat est moins garanti. Certains sites comme www.xmr.to permettent d’effectuer des paiements en Bitcoin tout en bénéficiant de l’anonymat offert par le Monero, ce qui contribue à l’intégration grandissante du Monero dans l’univers des crypto-monnaies.
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